Durant les années précédant mon déménagement à Sainte-Adèle, je faisais de cours séjours dans les Laurentides dès que la vie me le permettait. Mon partenaire et moi avons effectué des échanges de services à deux reprises, ce qui nous a permis de rester dans des maisons de Val-David pendant deux semaines à chaque fois. Une fois, nous nous occupions d’un immense potager, et l’autre fois, nous prenions soin de différents animaux (oies, poules, chat, hamster, etc). Nous avons également loué des habitations inhabituelles (yourte, mini-maison) et fait du canot-camping sauvage à Kiamika. Bref; notre évasion, c’était de venir où nous habitons maintenant.
Être bien chez nous
Chez nous, ça « sent le camping » : le parfum capiteux de conifère, de fougère et de mousse que j’identifiais avant aux vacances et à la liberté embaume ma cour. Cette cour, nous l’avons aménagée un peu avec les moyens du bord, avec des meubles que nous avions déjà et d’autres que l’ancienne locataire avait laissés sur place, une magnifique mangeoire à oiseaux fabriquée par mon beau-père, un hamac que l’on peut facilement transporter et déplacer, et, seul achat de la saison, une banderole de drapeaux tibétains, pour une touche de couleurs supplémentaire. Mes parents et mon conjoint ont soigneusement entretenu le terrain au printemps, ce qui fait que partout où l’on pose les yeux, il y a un peu de beauté : des fleurs sauvages, des jeunes arbres, de la verdure. Ici, les oiseaux chantent à partir de 4h00 du matin et j’ouvre grand la fenêtre pour mieux les entendre.
Quand je regarde dehors, je n’ai pas envie d’aller ailleurs. Ce décor, même si loin d’être digne de Pinterest, me satisfait. J’essaie si fort de me créer une vie de laquelle je n’ai pas besoin de m’évader pour me sentir vivante, que quand on me demande mes plans de voyage pour l’été, c’est avec fierté que je dis que je n’en ai AUCUN. Ce serait bête de quitter ce qui était autrefois ma destination vacances de prédilection pour aller ailleurs, non ?
Vivre ici est un privilège
Plus les mois passent, plus je me rends compte que d’habiter ici est un privilège. J’ai aménagé dans ce village laurentien en pensant naïvement qu’il me serait toujours facile de trouver des contrats de travail à distance, ce qui n’est plus le cas. Je ne sais donc même pas s’il me sera possible de survivre financièrement ici à moyen / long terme, c’est pourquoi cet été, je compte profiter de ce que les alentours ont à m’offrir. Comme l’an dernier (et celui d’avant, et l’autre avant ça), je n’ai aucun voyage à l’étranger de prévu, et ça me va comme ça. Je ne ré-énumèrerai pas les raisons qui me poussent à ne jamais prendre l’avion, mais je vais vous expliquer comment il est possible de profiter de notre propre coin de pays.
Explorer notre région
En discutant avec mon père, nous en sommes venu·es à la conclusion que nous vivions comme des touristes dans notre propre région : nous sommes avides de découvrir toutes les attractions, les restaurants, les cafés et les commerces charmants que les Laurentides ont à nous offrir. C’est d’ailleurs le premier conseil que je donnerais à quelqu’un désirant faire un staycation : explore tes alentours, observe d’un oeil neuf ce que ton quartier / ta ville ont a t’offrir. Essaie un nouvel endroit. Revisite tes lieux préférés. Ne fais rien par automatisme. Profite.
Même avec un budget moindre, il est possible d’emprunter un nouvel itinéraire de marche, par exemple. De visiter des galeries d’art (dont l’entrée est souvent gratuite). D’aller observer le lever ou le coucher du soleil d’un point d’observation différent. De s’installer dans un parc pour lire ou pour jouer. De ré-aménager ta cour ou ton balcon avec des objets et des meubles que tu possèdes déjà pour pouvoir apprécier l’extérieur en tout temps. D’organiser des soirées karaoké dans ton salon, ou des projections de films pour les jours de pluie.
Trouver le plaisir dans la répétition
Quand j’habitais Sainte-Rose, à Laval, je parcourais chaque jour ou presque le même trajet à pieds, en bordure de rivière. Et chaque jour, je découvrais quelque chose : un changement dû à l’évolution naturelle des choses, une maison que je n’avais jamais remarquée, un animal que je pouvais entrevoir, une teinte précise du soleil reflété sur l’eau… au lieu de trouver aliénant le fait de toujours emprunter le même sentier, je trouve ça poétique. Maintenant, je pourrais faire ce trajet les yeux fermés, et je m’en ennuie quand même chaque jour. Quand on vit pleinement l’instant présent, chaque moment est différent, même si l’on suit sans cesse le même itinéraire.
Cesser de fuir
Arrêtons donc de fuir notre quotidien si durement gagné, notre confort de privilégié·es, cessons de polluer par désir de prouver à autrui qu’on peut se les permettre, nous aussi, ce voyage onéreux, cette croisière débilitante, ce vol de seize heures parce que notre vie nous ennuie. Comme le dit si bien la philosophe Juliette Morice dans son essai Renoncer aux voyages : « La pratique des voyages – entre leur impossible interdiction et leurs dérèglements insensés – n’exhument-ils pas cette crise mélancolique, symptôme de notre incapacité à habiter le monde »
J’ai commencé par ne plus prendre l’avion, et maintenant j’ai de plus en plus de mal avec le concept de voyage, je trouve ça étrange d’aller visiter l’endroit où d’autres gens habitent .. à moins d’en faire une occasion de faire une activité précise, j’avoue que je vois de moins en moins l’intérêt. Comme toi, j’ai choisi avec soin l’endroit où j’habite, parce que je l’aime, et je n’ai pas particulièrement envie d’aller ailleurs à tout prix. Mais j’ai un peu l’impression d’être seule là dessus, donc merci pour ce partage ! :)
Ta maman serait fière de toi. Oups! JE suis fière de toi! Ha! Ha! Ha! Quelle sagesse, ce bonheur dans la simplicité où on ne se laisse pas aliéner par une trépidante vie qui serait toujours…ailleurs. Ici, maintenant, la vie est belle, dans l’immédiateté du moment quand on sait où poser nos yeux.